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What s happening in the house ?


Homere, c'est moi! (Homere it's me!)

29 août 199..., J'y vais de ce pas, je suis déterminé, j'ai quatre semaines sur cette terre dont je ne connais que V..., Yvelines, France. Je suis le Narrateur et malgré ce grand N, je ne me prends pas pour Proust, ce que chacun pourrait croire, à V... ou ailleurs, mais pour Homère. C'est du reste mon nom, le nom qu'ils m'ont donné le jour de fin d'été 199... où ils m'ont vu, où ils ont pris la photo : j'avançais sur un parquet très sombre, à mon âge on ne voit pas encore très bien, je n'y voyais même rien du tout, dans les mystères labyrinthiques de cette immense maison parfumée.



Si je me mets sur les parfums, on est foutu, c'est ce qu'elle m'a dit qu'il ne faut pas faire, à peine j'étais là sur ses blue-jeans et que je ronronnais correctement, qu'elle m'a dit ça : fais pas comme moi, pas de digression. Comme narrateur, j'étais mal barré. Et flash, la photo, alors que j'avais encore ces yeux bleu faïence que je déteste, qui sont laiteux et évidemment ce jour-là encore plus bleus de trouille, sans arriver au bleu des blue-jeans pour faire le caméléon, pour m'assortir, pour être sûr de figurer dans le tableau. Entre parenthèses, elle a les genoux anguleux et les jeans étaient costauds, de bonne qualité, j'y reviendrai.




Flash donc, la photo : mes yeux bleus avec nuage de lait, une hérésie de jeunesse quand je suis un chat européen qui répond si bien aux normes de ma lignée laquelle tient du singe pour la vélocité, du tigre pour la zébrure terrifiante et de l'homme pour l'intelligence, je laisse ici les comparaisons comme un jouet idiot qui me lasse, surtout la dernière à propos de l'homme, mon Dieu, et j'ai cinquante millions d'années d'expérience de plus que les spécimens précités, lisez des livres, mangez des pommes, faites les deux en même temps, au final nous sommes tous griffes, intestin et cerveau, le poids de celui-ci étant aléatoire et nous le mettrons en dernier comme de juste.
Chat européen donc, sans dégénérescence du type, qui aurait pu sortir d'un élevage où l'on m'aurait payé très cher, moins cher que ce connard de persan d'à côté mafflu joufflu mais enfin - un brown tabby tout ce qu'il y a de réglo, avec un M sur le front, M pour Mahomet, avec ces yeux qui deviendront jaunes (je pense ce sera mieux) et, incrusté dans ma fourrure, au pochoir, sur le dos, un papillon tout blanc dont je ne pourrai jamais me débarrasser, ça n'est pas qu'il me plaise forcément mais du moment qu'ils se sont extasiés c'est l'essentiel.



Je n'ai rien dit de mes problèmes physiques, des fois qu'ils les remarquent et tentent de soigner les complexes subséquents, il paraît qu'en Amérique ça se fait, qu'il y a des psychiatres pour chats, merci bien, dans le noir et blanc de mes premiers jours j'ai vu Vol au-dessus d'un nid de coucou, en vidéo. J'ai la mâchoire un peu tombante, genre déjà dentier, ils n'ont pas remarqué, pourtant, flash la photo, et à l'évidence ce sont des maniaques des trucs qui figent le temps, ils doivent avoir très peur qu'il passe, qu'il leur file entre les pattes comme je peux le faire moi, et c'est en sentant cette crainte que j'ai pensé à cette Recherche du Proust, je ne suis pas idiot, et d'un coup j'ai compris aussi, à propos de ce qu'elle faisait. Lui pas encore tout à fait. Enfin apparemment ils ne se quittent jamais, c'est l'Aigle à deux Têtes que j'ai vu aussi, qui sera toujours en noir et blanc. Bref, ils font tout ensemble, ces deux. Là, c'est plus méandreux que tout ce qu'il y a à parcourir dans les étages (combien? nous le saurons sous peu) de cette maison.



A V..., Yvelines, France, où je suis né et où je tête encore ma mère (du reste l'heure approche où je vais vous quitter), m'étendant au hasard sur la table du salon, j'ai léché, mordu, très abîmé et finalement dévoré, cette femme, Colette, ses Dialogues de Bêtes - à peine avais-je ingéré la chose sous forme de boulettes, que je me suis dit ceci : le meilleur parti à prendre est bel et bien de trouver des gens qui restent chez eux à raconter leur vie, mélangée de façon plus ou moins inextricable à celle des autres, ce qui est très compliqué et les tient assis ; ce qui permet à un chat nombre de facilités, y compris de les emmerder à chaque heure du jour qu'ils passent absurdement à ne pas faire de sport et à ce qu'ils appellent travailler.

Tu parles. Travailler qu'ils disent, faites donc faites donc, ils sont là derrière leur bureau Bernard Tapie et leur macintosh à se tuer les lombaires et les cervicales, quel tassement, en qualité de chat et d'étireur de long qui veille spécialement à ma santé vertébrale, brrrrmmm, j'en ai des frissons d'avance, je me vois moi comme une succession de cerceaux enfilés sur une tige et je passe mon temps à sauter à travers moi-même, seulement ma tige principale plie, pas la leur qui peut se rompre, qui est un genre de poutre faîtière à tuiles bouleversées au premier vent, et tout ça vieillit à toute allure, qu'il faut ravauder toujours... tout ce que vois d'eux c'est que, derrière cette planche de bois à caissons, assis tout droit sur des chaises meurtrières, l'oeil fibrillé de conjonctivite devant cet écran aveuglant, ils passent leur temps, le recherchent, le perdent, le gagnent, pas si sûr... Sans coussins, pattes sur le nez, dos flexueux, point de salut, ils ont une vie de chien, c'est certain, en tous cas le genre de vie suppliciante dont jamais un chat ne voudrait pour des milliards - ceux que, précisément, ils n'ont pas, c'est pourquoi ils s'obstinent, je l'ai senti de suite mais n'en suis pas encore à leur suggérer d'en revenir à plus de bon sens : du moment que j'ai le vivre et le couvert, rien ne sera remis en question... Je peux vous dire qu'ils passent ce temps à se tenir le dos, c'est l'un qui le fait quand l'autre tape sur la machine et vice versa, ils ont l'air de souffrir terriblement et je vais voir de mes yeux voir quand ils seront dorés, ce qu'il en est de ce travail proustien, générateur quoi qu'il en soit dudit couvert et de ce que je pressens être, pour eux, des surgelés - et pendant qu'ils croient travailler comme ils disent, moi, je pourrais vous raconter la vraie vie, la Vie Matérielle comme l'a écrit Duras, mais déjà je vous perds, je le sais.





Prenons un truc qu'eux-mêmes bien qu'humains, paraissaient avoir compris, c'est à propos de ce mot, "mimétique", qu'ils disaient : de l'être et le rester était une question de survie, pensant à la mienne, je me suis fait d'un coup chat d'écrivain, chat vénitien, elle parlait de mon masque elle avait l'air d'y tenir, et il va falloir aussi que je sois plus ou moins, je dis bien plus ou moins, un chat cybernétique. Tout ceci me consterne mais ils sont trop drôles et je n'ai pas trente-six solutions : j'ai failli atterrir chez un copain du fils de la Dame qui est la maman de ma mère, le gars joue du saxophone, instrument dont j'ai horreur, il a juste une vingtaine d'années, encore des boutons et rien à faire pour les garder à la maison à cet âge, mâles ou femelles, notons ici qu'on ne les opère jamais, eux, sauf cas d'espèce, mais ELLE m'a dit PAS DE DIGRESSION. C.Q.F.D., on en reparlera plus tard, c'est ce que j'ai compris pour PAS DE DIGRESSION.



Chant II

Hey!
What's happening
in this house?


Cliquez sur la maison!

"Frappez,
et on vous ouvrira",
dit l'Evangile.

C'étaient les impressions de ma première visite chez ceux-là que j'ai gaulé, vite vu, en tentant de cacher mes mâchoires.

A plus.



Homère








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